Un Homme d’Honneur

Un homme intègre.
Le pilier de la mosquée Adda’wa
Mohand Tighlit est un grand moudjahid, résistant comme dit la France libre, fellaga comme disait la France colonialiste… Il militait pour la dignité et l’indépendance de l’Algérie, surtout en Allemagne avec Mouloud Kacem Naît Belkacem, un grand Homme de la même origine que lui : kabyle. Mais les deux ont le même ADN que celui des compagnons du Prophète : l’honneur. Naît Belkacem est, avec le grand savant Ben Badis, le plus important défenseur de l’arabe et de l’islam de toute l’histoire algérienne.
Mohand TighlitMohand Tighlit, le compagnon de combat de Naît Belkacem, a été plusieurs fois arrêté et sauvagement torturé par la France, surtout au commissariat du 19ème arrondissement de Paris qui était situé au 17 rue de Tanger, devenu école primaire sans nom propre, sauf celui d’école du 17 rue de Tanger. Comme si elle attendait d’être baptisée au nom de ce résistant musulman qui y a laissé ou ensemencé une partie de son sang. C’est au 39 de cette rue que le destin va récompenser cet Homme de la Libération par l’édification de la grande mosquée Adda’wa. Le champ d’honneur de Si Mohand, c’est se battre pour délivrer l’Algérie du colonialisme français, autant que se battre pour élever la plus grande mosquée de France.
L’honneur et la discrétion ont accompagné Mohand Tighlit pendant sa vie et pendant sa mort. Sa dépouille a été lavée et enterrée par ses compagnons, dont ses deux plus proches imams : Mohamed Moudjahid et Daoud Mahfoud. Comme l’a été Abdelkader Benahmed, le premier homme de la mosquée Adda’wa, lors de sa première journée dans l’au-delà.
4 septembre 1978 c’est la grande prière de l’Aïd. Pour la première fois, Si Abdelkader est absent de la mosquée Adda’wa, hébergée à l’époque à l’église de Ménilmontant. Il est retenu par l’Algérie, cloué au lit de la maladie. Chaque Aïd, Si Abdelkader invitait les responsables et les fidèles de la mosquée à prendre le thé chez lui à Belleville. Ce matin de fête, après la grande prière, le vide est pesant. Si Mohand Tighlit soupire larmoyant : « on va prendre le thé chez Si Abdelkader ? » Quelques heures plus tard, il embarque de l’aéroport d’Orly avec Daoud et Moudjahid. Ils n’ont pas l’adresse exacte de Si Abdelkader, juste le nom hésitant d’un quartier où il aurait vécu, où le taxi les dépose dans l’obscurité de la nuit et de l’incertitude. Cheikh Daoud marche en criant « Si Abdelkader… Si Abdelkader… » C’est ainsi qu’ils le retrouvent ! Ils dinent avec lui. Ils dorment chez lui. Le lendemain soir, il les quitte. Le surlendemain, ils lavent sa dépouille mortuaire. Ils organisent et prononcent la prière funéraire. Ils l’enterrent. Ils quittent l’Algérie le jour même. Et regagnent Paris pour poursuivre et faire-vivre son combat en France. Celui d’un grand soldat inconnu de l’islam. Celui d’un Homme d’Honneur méconnu des musulmans.